Depuis plusieurs années, le prix du chocolat augmente régulièrement. Partout dans le monde, les consommateurs constatent une hausse du coût des tablettes ou du cacao. Cette flambée inquiète autant les gourmands que les industriels.
De mauvaises récoltes
En Côte d’Ivoire et au Ghana, les récoltes de cacao se sont effondrées ces dernières années. Or ces deux pays fournissent 60 % du cacao mondial. En 2024, la production ghanéenne a chuté presque de moitié. La faute revient à un virus ravageur. En effet, ce fléau attaque les arbres. Et il réduit leur rendement en imposant souvent leur abattage.
Ensuite, les conditions climatiques déraillent. De fortes pluies suivies de sécheresses intenses nuisent aux plantations. Résultat : la Côte d’Ivoire a suspendu ses ventes anticipées. Quand l’inquiétude monte, les cours s’emballent. Ainsi en 2024, la tonne dépasse 10 000 $ à New York. Il s’agit d’une situation inédite depuis 50 ans.
La spéculation aggrave la crise
Les marchés financiers amplifient la tension. Des milliards affluent vers les contrats à terme du cacao. Les hedge funds misent sur la hausse. Les cours s’envolent loin des réalités physiques. Le chocolat devient un “or brun” traité comme le pétrole ou l’or. Ainsi les traders remplacent les acheteurs dans les grands groupes. Aussi ils jonglent avec les stocks, les prévisions, les taux de change. Cette financiarisation pousse les prix vers des sommets même sans pénurie réelle.
Des fermiers mal rémunérés
Les producteurs africains pourtant à la source de la richesse touchent peu. En Côte d’Ivoire, le prix bord champ reste fixé par l’État à environ 1,50 $/kg. Les ventes anticipées empêchent toute revalorisation. Le Ghana plus souple paie légèrement mieux avec un prix à 1,65 $/kg. Mais ces tarifs restent largement décrochés des prix mondiaux.
En revanche, au Cameroun ou au Togo, sans régulation étatique, les prix atteignent 4,5 $/kg. En Équateur, les producteurs reçoivent jusqu’à 5,5 $/kg. Il s’agit d’une situation inédite qui ne profite qu’aux pays libéralisés ou très sollicités.
Les coûts explosent côté industrie
La hausse du cacao entraîne une révision complète des stratégies industrielles. Pour absorber la hausse sans perdre de clients, les marques redoublent d’astuces. D’une part, ils mettent moins de produit pour même prix. Par exemple une barre de chocolat peut perdre 10 g sans baisse tarifaire.
D’autre part, les recettes changent. Aussi le cacao disparaît au profit d’arômes, de beurre de cacahuète ou de caramel. Le chocolat devient goût chocolaté. Ainsi le goût reste et la matière noble s’efface. Une autre méthode repose sur l’augmentation des produits haut de gamme. Ainsi les versions de moins bonne qualité envahissent les rayons. Le consommateur pris au piège paie plus pour un produit dégradé.
Les tablettes artisanales coûtent plus cher
Une barre de chocolat contient peu de cacao. Son prix reste bas grâce au sucre et aux huiles bon marché. En revanche, une tablette artisanale riche en fèves nobles revient bien plus cher. Le transport, les faibles volumes, et les normes bio tirent les prix vers le haut. Par exemple, au Mexique, une tablette artisanale locale coûte jusqu’à 10 $. En Europe, un chocolat équivalent se vend autour de 3 ou 4 $. L’écart s’explique par les circuits d’importation, les marges, et le manque de régulation locale.
L’offre peine à se renouveler
Le cacao demande des conditions strictes : chaleur, humidité, ombrage, sols fertiles. Avec le réchauffement climatique, ces critères se raréfient. Aussi la reforestation n’avance pas. Le manque d’investissements freine la transition vers des variétés résistantes. Et l’orpaillage illégal envahit les forêts. Par conséquent les jeunes générations délaissent la culture du cacao au profit du caoutchouc ou de l’huile de palme. Ainsi sans politiques de soutien fortes, la production stagne. Les arbres vieillissent, les terres s’épuisent. Une baisse durable de l’offre se profile.
Des prix qui flambent en rayon
Prenons un exemple : une tablette de chocolat noir à 75 % de cacao. En 2023, le cacao coûtait 2400 $/tonne. Aujourd’hui, il dépasse 6000 $/tonne. Le coût matière première grimpe de 0,25 € à 0,50 $ par tablette. De plus, les distributeurs appliquent des marges.
Pour les marques bio ou équitables, le choc est plus maîtrisé. Une tablette équitable voit son coût matière première monter de 0,40 $ à 0,60 $. Mais la hausse reste inévitable. Même les chocolats de grande surface augmentent, une fois les stocks bon marché écoulés.
La hausse actuelle ne se résume pas à une simple inflation à la chocolaterie à proximité. En effet, elle traduit une crise de fond : celle d’un système qui négligeait le cacao depuis trop longtemps. Aujourd’hui, le chocolat redevient un produit rare. Il s’agit d’un luxe qu’on savoure et qu’on respecte. Peut-être faut-il en manger moins mais mieux ?
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